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Libération
Critique

Mon ennemie la rose. Un polar à l'orientale, où Pierre Mac Orlan honore un genre littéraire qu'il a abordé sans aucune condescendance. Pierre Mac Orlan, Le Carrefour des trois couteaux, Folio, 354 pp., 39 F.

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publié le 27 mai 1999 à 1h11

C'était l'époque où Paul Morand, préfaçant dans la collection

«Police-Sélection», lancée par Albert Pigasse, créateur du Masque, un recueil de nouvelles de Dorothy Sayers, écrivait: «Je ne sais si l'on rend suffisamment hommage au tour de force qu'accomplit le roman policier: faire peur à l'homme contemporain.» Celle aussi où Pierre Benoit, Joseph Kessel et Francis Carco étaient membres du jury du Grand Prix du roman d'aventure, décerné pour la première fois en 1930 à un jeune libraire parisien nommé Pierre Véry. Cinq ans plus tard, Kessel incitait son ami Pierre Mac Orlan, alors âgé de près de 60 ans, à publier le Tueur n° 2 au Masque ­ le premier polar de Mac Orlan, la Tradition de minuit, avait été édité chez Emile-Paul en 1930. Le chansonnier-bourlingueur et romancier y avait mis à profit ses nombreux séjours sur les bords de la mer du Nord pour imaginer une rocambolesque histoire d'actrice assassinée à Knokke-le-Zoute, dont le cadavre était retrouvé à Londres, dans une gare. L'ombre du Paul Féval des Habits noirs et des Mystères de Londres planait sur ce roman. En revanche, c'est son admiration pour le conteur Kipling qui nimbe l'écriture du troisième récit noir de Mac Orlan, l'injustement oublié Carrefour des trois couteaux, que Francis Lacassin nous fait découvrir aujourd'hui. Dès les premières lignes, l'ambiance est celle d'une fiction tout à la fois rude et sophistiquée, proche de l'auteur anglo-indien de Trois Troupiers: «Les légionnaires, mal vêtus, erraient, tout