Menu
Libération

La discrète

Article réservé aux abonnés
Pour le premier anniversaire de sa mort, trois volumes de et autour de Dominique Aury, auteur d'«Histoire d'O» et pilier de Gallimard. A propos de Paulhan, Sartre, Borges et O.
publié le 10 juin 1999 à 23h27

Paris étant une ville où tout se sait sans que ça se sache, Dominique Aury a pu, pendant quarante ans, protéger son secret en le partageant. «Pourquoi refusez-vous, du moins publiquement, de reconnaître que vous êtes l'auteur d'Histoire d'O», lui demande Nicole Grenier en 1988. «J'ai longtemps refusé pour ne pas embêter ma famille», répond Dominique Aury. «Maintenant qu'il n'y a plus personne pour être choqué, je n'ai pas du tout envie de changer de position. Pendant des années, quand on me posait la question, je m'en suis tenue à: "C'est la question à laquelle je ne réponds jamais. Pas mal comme réponse, qu'est-ce que vous voulez répliquer à ça? Il n'y a plus à insister, et on n'insistait pas.»

Dans ces entretiens, qui paraissent pour le premier anniversaire de sa mort (elle avait 90 ans), Dominique Aury, qui s'appelait à l'origine Anne Desclos, résume son rôle de secrétaire générale de la NRF: «Les gens comme moi sont à côté!» A côté de Jean Paulhan, puis de Marcel Arland, de Georges Lambrichs. Et avant d'être à côté? Elle est la première fille en khâgne à Condorcet. Elle est doublement bilingue, étant la fille d'un agrégé d'anglais doué pour le bonheur, et d'une mère douée pour le malheur. Assez secrète quant à ses propres aptitudes, elle retrouve en Paulhan le bon tempérament de son père. Ils se rencontrent pendant la guerre. Déjà clandestine, elle distribue les Lettres françaises, après avoir écrit, à la fin des années 30, dans des journaux d'extrême droite.

Dominique Aur