Alors que certains pensaient que Derrick était la traduction
germanique du mot «sieste», l'essayiste Thomas Sandoz démontre qu'en fait, ce feuilleton ne se contente pas de jouer son rôle d'allégorie de l'Allemagne d'après-guerre: en vingt-cinq ans d'enquêtes sur le petit écran, l'Oberinspektor de la Kriminalpolizei munichoise Stephan Derrick «dit quelque chose de la façon dont l'homme d'aujourd'hui se heurte à la justice, aux normes sociales et à l'angoisse des temps futurs». Conçu en trois parties (dont une offrant les résumés de tous les épisodes), l'essai plonge d'abord dans les origines du feuilleton, ancré dans la tradition télévisuelle germanique de la Krimi du vendredi soir. C'est dans ce contexte qu'est lancé, en 1974, Derrick , d'abord conçu sur le modèle de «l'inverted story»(le coupable est connu dès les cinq premières minutes). Ce principe un rien déroutant est rapidement abandonné. Mais outre le soin tout particulier apporté au scénario (dont Herbert Reinecker, 85 ans, est l'auteur exclusif depuis un quart de siècle), le succès bientôt planétaire des enquêtes de ce Bavarois taiseux tient à la personnalité de son interprète, Horst Tappert, ainsi qu'à celle de son adjoint Harry Klein, incarné par Fritz Wepper. Né en 1923 dans le Wuppertal, Horst Tappert est surtout connu pour ses prestations théâtrales lorsqu'il enfile pour la première fois l'imper (et la moumoute) de Derrick. Guère plus philanthrope dans la vie qu'à l'écran, il affirme avoir connu les plus grandes