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Interview

Le divan est toujours debout.Si on arrivait à calmer toutes les passions, la societé serait un cimetière». Elisabeth Roudinesco. Pourquoi la psychanalyse? Fayard, 200 pp., 95 F.

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publié le 16 septembre 1999 à 0h43

Quoique préconisant l'analyse, vous écrivez que «fort heureusement»

aucune science ne viendra jamais à bout des souffrances psychiques. N'est-ce pas désespérant?

Si l'on arrivait à calmer toutes les passions, on n'aurait plus une société mais un cimetière. Je ne revendique pas de façon masochiste la souffrance, mais empêcher l'expression des passions qui peuvent, en effet, faire souffrir, c'est mortifère. C'est une illusion de croire qu'on va en venir à bout par des psychotropes. Ils sont nécessaires et efficaces ponctuellement, mais il ne faut pas que l'idéologie médicamenteuse du non-conflit affaiblisse la notion même de sujet: c'est tout de même à travers le conflit et les luttes qu'on conquiert son identité.

Est-ce que les patients ne viennent pas désormais chercher aussi (en vain) sur le divan cette panacée du non-conflit, ce qui expliquerait une certaine désaffection?

Il y a sans doute désaffection du modèle divan-fauteuil depuis une vingtaine d'années. La demande a changé: on fait aujourd'hui une analyse parce qu'on va mal, alors qu'on pouvait y aller avant tout simplement pour se connaître. Mais en même temps, il y a des psychanalystes partout: un jeune praticien ne passe plus sa journée dans son cabinet: il travaille en institution ou sur le terrain (drogués, délinquants,"). C'est une évolution positive.

Vous défendez la psychanalyse contre les médecines alternatives et croyances de toutes sortes. Mais après tout, si les gens en sont satisfaits, pourquoi pas?

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