Roger Fry fut un éminent expert et critique d'art, spécialement
spécialiste de la peinture italienne. Il avait le goût sûr aussi quant à ses contemporains et introduisit en Angleterre, contre vents et marées académiques, les oeuvres de Cézanne, Matisse et Picasso. Il était peintre lui-même mais sans vraiment de talent. Il le savait et en souffrait. Il aima énormément sa femme puis elle devint folle à cause d'une horrible maladie (sa boîte crânienne épaississait et lui écrasait le cerveau). Après, comme il n'était pas de marbre, il aima d'autres femmes dont Vanessa Bell. Roger Fry fut très ami avec la soeur d'icelle, Virginia Woolf, ce qui forcément est bon signe. Il fonda, avant la Première Guerre mondiale, l'entreprise d'art industriel Oméga, où l'on fabriquait des chaises, des tapis et de la vaisselle d'artiste, créant le design en le sachant. Il écrivait des articles. Il écrivait des livres. Il écrivait des lettres. Il avait des amis et le goût des conversations abstraites et infinies. Il avait des ennemis aussi dont un qui le traita (après sa mort en 1934) de Staline et Hitler tout ensemble. Bref, c'était un homme loin d'être inintéressant, mais il n'est pas certain qu'on se soit précipité sur sa biographie si elle n'était signée par Virginia Woolf. La Vie de Roger Fry est le dernier texte publié (en 1940) du vivant de l'écrivain et le dernier grand texte encore inédit en français.
Il est vrai que les lecteurs du Journal de Woolf en avaient déjà entendu parler et pas en b