Il va arriver, c'est sûr. Dans une heure. Non, dans deux. C'est
annulé. Finalement, un coup d'oeil en coin, le voilà: Aïssa Khelladi. Non, non, non, il ne veut pas parler à la presse. Si on ne le comprend pas, lui se comprend. Il ne peut pas en dire plus mais en pense long. «Vous voyez ce que je veux dire.» Il y a quelques années, il a reconnu avoir été, jusqu'en 1988, officier à la sécurité militaire, les services secrets algériens. Puis, il est devenu journaliste, passant sans transition au rôle du martyr, emprisonné par ses anciens collègues et défendu par Reporters Sans Frontières. Exilé, il dirige depuis 1994 une bonne petite maison d'édition, Marsa, à Paris. Dans le monde entier, la lecture d'un roman policier consiste principalement à trouver qui est l'assassin. En Algérie, le problème est plus complexe. Il s'agit aussi de découvrir qui est l'éditeur et qui est l'auteur. Le cas d'Aïssa Khelladi est pour ainsi dire un classique du suspens algérien: trop d'identités pour un seul homme, trop de rumeurs pour une seule vie. Yasmina Khadra, qui écrit d'excellents romans noirs, est plus atypique (1). Pseudonyme de femme, voix d'homme lors d'une de ses rares interviews au téléphone, pendant l'émission de Gérard Lefort sur France-Inter. Pour le reste, personne ne sait. Si les noms d'emprunt étaient fréquents pendant les années noires des assassinats, ils se portent moins maintenant. Il serait même branché de se dévoiler depuis que Y.B.,jeune auteur à la page, a enlevé son m