Elle aurait eu 100 ans le 18 juillet 2000 et aurait fait partie du tout petit cercle des écrivains fêtant leur centenaire de leur vivant. Avec Nathalie Sarraute, morte, hier, à 99 ans, après avoir été jusqu'à il y a quelques semaines en pleine possession de ses moyens physiques et intellectuels, disparaît une grande figure de la littérature contemporaine. Pionnière de ce qu'on appela au début des années 50 le Nouveau Roman, mouvement informel et diffus né autour des éditions de Minuit et qui se caractérisa par un abandon des canons traditionnels du roman, comme l'intrigue et les personnages. A sa façon, discrète, exigeante, impavide, Nathalie Sarraute aura même été un précurseur de cet élan novateur d'après-guerre: Tropismes, son premier livre, parut en 1939, soit près de quinze ans avant les premiers livres de Michel Butor ou d'Alain Robbe-Grillet; l'ouvrage passa complètement inaperçu, sauf de quelques rares lecteurs, tels Max Jacob, qui salua «un grand poète», ou Sartre, qui fut séduit par son «charme» et son ton «naturel et juste».
Mouvements intérieurs. Nathalie Sarraute avait commencé Tropismes en 1932, écrivant dans les cafés l'écrivain conserva jusqu'à son grand âge cette habitude d'écriture , assemblant lentement de courts fragments sans personnages bien définis. Emprunté à la biologie, le titre du livre cachait une démarche profondément humaine et, par certains côtés, déroutante. Livre après livre, décortiquant les comportements et les attitudes