Menu
Libération
Critique

Camarade papa. Une enfance dans le Nanterre des bidonvilles, quand la culture communiste pouvait encore passer pour une évidence. Bernard Ruhaud. La Première Vie. Stock, 112 pp., 79 F.

Article réservé aux abonnés
publié le 21 octobre 1999 à 1h16

Des autres vies de Bernard Ruhaud, on ne sait pas grand chose. Dans

un communiqué, Stock précise afin que les journalistes puissent le répéter que «Bernard Ruhaud est né à Nanterre en 1948. Il vit à La Rochelle. Depuis l'âge de quinze ans, il a exercé divers métiers (apprenti carreleur, manoeuvre dans le bâtiment, aide-cuisinier, éducateur). Depuis 1985, il assure la formation des assistantes maternelles du Service d'aide sociale à l'enfance», alors, forcément, ils le répètent.

Ce premier livre commence par un avertissement qui touche ses contemporains, ceux qui nouèrent des garuches, ceux qu'on envoya enfants dans des colonies de vacances, ceux qui avaient oublié ça, qu'on a plusieurs vies: «Dans le jeu de piste, chaque participant dispose de trois vies. Il s'agit en général de petites bandes de tissu de couleurs vives (une couleur par équipe). Chaque joueur doit la glisser dans son dos, à la ceinture, en la laissant dépasser suffisamment pour que les adversaires des autres équipes puissent tenter de l'attraper lors des combats. Quand un joueur a perdu ses trois vies, il est mort.»

La mère de Bernard Ruhaud est morte quand il avait 9 ans, elle 39, le 2 avril 1957, surprise dans sa cuisine par une hémorragie cérébrale, après trois vies trop courtes dont son fils Bernard ne sait pas tout, rien de son enfance, rien du père du premier enfant qu'elle amena dans sa corbeille de mariage. Rien ou peu. Bernard Ruhaud lui consacre les six dernières pages de son récit, denses et légères,