Appréhendez-vous ces masterclasses?
Non, j'ai donné des centaines de cours dans ma vie. Le plus impressionnant, c'est de voir ma tête en rouge et en énorme sur tous les arrêts de bus.
Et la confrontation avec les critiques? Ne redoutez-vous pas la critique biographique, qui confond parfois vos doubles fictifs avec l'auteur?
Bien sûr, mais ce n'est pas de l'avis de X ou Y qu'on tire l'énergie nécessaire pour écrire, alors ça m'est égal: le moteur, c'est la curiosité envers les personnages. Au centre des trois livres en débat ici, il y a un homme embarqué dans une galère: Mickey Sabbath dans le Théâtre de Sabbath, par exemple, est quelqu'un qui fait entrer le répugnant, le repoussant, dans sa vie; Levov le Suédois, le héros de Pastorale américaine, lui, veut le laisser à l'extérieur. Dans Opération Shylock, à travers ce personnage qui s'appelle Philip Roth, ce n'est pas sa vie personnelle, mais toute la turbulence et le chaos d'Israël, toutes les possibilités de turbulences juives qui s'écoulent.
La littérature sert-elle à laisser entrer ce «repoussant»?
Avant, il y avait une lutte entre le sacré et le profane, puis le profane a été admis dans la littérature, au XVIe siècle, avec Rabelais, non? Alors je n'ai plus à lutter pour ça! Mes personnages ne choisissent pas: le repoussant entre en chacun sous la forme du désordre, du chaos, de la maladie, de la perte, ... Ou le chaos social, ou l'Histoire elle-même: le Viêt-nam, la Seconde Guerre mondiale. Même si vous êtes capable de tenir le repoussant à l'écart, le monde ne cesse de vous le représenter. L'intérêt, c'est ce que le personnage en fait. Seymour Levov fait un choix que beaucoup de gens font, mais le chaos revient avec ce qui arrive à sa fille