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Libération
Interview

«Mon père travaillait comme un fou».

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publié le 9 décembre 1999 à 1h59

A quel moment décide-t-on d'écrire un essai?

C'est venu après deux romans, Riche et légère et Course d'amour pendant le deuil, qui étaient une sorte de diptyque autour de la question du maître, pas maître au sens des philosophes, mais maître, comme disait Vitez qui aimait ce vieux beau mot, plutôt que professeur. Je me suis dit que ces fictions tendaient vers l'essai. Je me suis tournée vers une forme de roman radicale, XIXe siècle, avec histoire et géographie, sur la question basque (Etxemendi). Et, parallèlement, je me suis sentie libre d'écrire des essais qui gardaient un aspect romanesque. J'ai repris un certain nombre de textes dans la Séduction brève, en ai écrit d'autres, c'est là que j'ai acquis la liberté des sous-titres, des séquences: une liberté de navigation. Je ne cherchais plus la continuité, comme dans un roman, mais des angles d'attaque, des angles de vue.

Et puis JB Pontalis me demandait depuis longtemps quelque chose pour la collection «L'un et l'autre». Nerval l'a emporté à cause d'une émotion proche, je le découvrais, et c'est très beau d'être amoureux tardivement. Il était impossible d'être loyale et de parler avec sincérité de cette rencontre tardive, de ma passion pour lui, sans en passer par l'empêchement, et par la réticence profonde qu'évoquaient ce nom et ce destin en moi. Donc, c'était parler de mon père.

Jean Delay, et vos professeurs, parlaient des renoncements exigés par l'oeuvre littéraire. C'est à cette vision austère que vous vous êtes opposé