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Libération

Soupe aux lettres. C'est du poulet.

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publié le 9 décembre 1999 à 1h59

Boute-en-train comme des condés melvilliens (au sens Jipé, pas Herman), un nombre important de messieurs ayant (ou ayant eu) «des fonctions ou une activité leur permettant de porter un jugement sur les oeuvres portées à leur appréciation» s'étaient réunis dans un salon moquetté de marron du Méridien Montparnasse pour assister à la remise du prix du Quai des Orfèvres, «destiné à couronner chaque année sur manuscrit anonyme un roman policier en français décrivant les modalités de fonctionnement de la police et de la justice française». C'est à Pierres de sang d'André Arnaud, ancien ambassadeur de France en Thaïlande, que M. le préfet de police (ni Vidocq ni Vautrin, mais qui nota cependant que «le corps diplomatique a plus de prédispositions littéraires que le corps préfectoral») remit le prix, non loin d'un banc de fruits de mer tenu en respect par des gorilles. Rappelant que «dans tout diplomate il y a un Stendhal ou un Romain Gary qui sommeille», mais que ces illustres prédécesseurs (auxquels il adjoindra ultérieurement les noms de Claudel, Morand ou Saint John Perse) ne se sont pas attaqués au polar, «lacune qui méritait d'être comblée», André Arnaud avoua, sans même que la maison poulaga ait à le travailler, «une fierté vaniteuse à recevoir ce prix».

Nettement plus féminine mais guère plus délire, l'assistance du prix Jean Giono roucoulait d'aise quand Pierre Bergé, membre de droit d'un certain nombre de jurys dont celui-ci, appela Jean d'Ormesson sur l'estrade du Lutétia.