Cela fait trente ans que le titre même avait été trouvé et l'ouvrage
annoncé à paraître. Henri Atlan confesse qu'il s'est attelé à sa rédaction pendant sept ans: les Etincelles de hasard, ouvrage dense et imposant par son érudition, est l'oeuvre maîtresse du biologiste, enseignant à Paris et Jérusalem, siégeant au Comité d'éthique et dont les essais, depuis le Cristal et la fumée, ont régulièrement suscité l'intérêt d'un large public. Son sujet de réflexion le plus constant concerne les problèmes éthiques soulevés par les progrès des biotechnologies. Deux autres ouvrages paraissent simultanément, qui abordent deux aspects concrets de la question (1). Mais les Etincelles de hasard déborde largement les thèmes habituellement débattus, pour les envelopper dans une perspective où l'histoire des sciences entre en résonance avec les commentaires talmudiques, la mythologie occidentale et la philosophie.
«J'avais l'intuition que ces légendes contenaient des éléments d'une théorie de la connaissance différente de ceux dont nous avons hérité»: entre l'époque où le mythe du Golem prétendait aider l'homme à connaître ses propres limites, et celle où s'écrit l'histoire de Frankenstein, dont la leçon est apparemment analogue, l'humanité semble avoir opéré une étrange mutation spirituelle, qui a accompagné l'émergence de la connaissance scientifique. Quand cette dernière a pris sa forme achevée il y a trois siècles et entamé sa course dans la connaissance toujours plus complète de l'univers,