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Libération
Critique

Guibert, des yeux à l'âme. Quand il promenait son regard curieux sur le monde de la photo. Hervé Guibert, La photo, inéluctablement, Gallimard Collection Blanche, 528 pp., 150 F. Texte d'Yvonne Baby.

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publié le 23 décembre 1999 à 2h21

En 1977, deux ans après la parution de Roland Barthes par Roland

Barthes, Hervé Guibert, presque 23 ans, commence à écrire sur la photographie au journal Le Monde à la demande d'Yvonne Baby, qui le décrit ainsi: «Il a le front bouclé, un souvenir acéré, astral, les mains déjà pleines de chimères, de couteaux, de douceurs.» Dans La photo, inéluctablement, recueil d'articles écrits de 1977 en 1985, on sait tout de suite qu'il lancera les couteaux plus tard. Pour l'instant, il écrit des textes souvent courts, incroyablement précis, avec des mots qui partent comme des flèches et touchent au coeur sans blesser. Son intention est simple, comprendre, puis raconter au plus près, au plus juste, et toujours avec des yeux d'enfant ébloui. Qu'est-ce qu'il cherche dans la photographie? La vie. D'où ses compagnons de route vite repérés, André Kertész et Edouard Boubat, Henri Cartier-Bresson et Bernard Faucon, August Sander et Lewis Hine, Eugène Atget et Duane Michals. Certains sont déjà morts, il ne les a pas connus, mais on sent qu'ils lui manquent: Diane Arbus («Les photos de Diane Arbus portent évidemment la mort, mais elles portent aussi la vie, terriblement, magnifiquement.») Ou vont bientôt mourir: Cecil Beaton («Un photographe immense, dont le brouillage des genres n'a jamais atténué sa force, mais l'a au contraire réalimentée, revivifiée.») D'autres vont simplement le rendre heureux, comme Jacques-Henri Lartigue qu'il rencontre en 1985, chez lui, et qu'il presse de questions, peut