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Libération
Critique

Sur Plath

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Le journal intime de l’auteur de «la Cloche de détresse», laboratoire d’introspection et d’acharnement sur soi.
publié le 30 décembre 1999 à 2h15

C’est le monde extérieur qui fait le prix des journaux les plus intimes. Pour cette raison, les Journaux 1950-1962 de Sylvia Plath sont de prime abord décevants. Alambic d’un ego en surchauffe, ces pages sortent rarement du pur laboratoire de l’introspection. Il s’agit d’une entreprise d’acharnement sur soi comme on en a rarement vu. Fin 1952, à 19 ans: «J’ai peur. Je ne suis pas solide, je suis creuse...»Un an plus tard: «Ma corruption pourrait de nouveau éclater au grand jour, qui sait.» De ses dépressions, Sylvia Plath fera le roman la Cloche de détresse, paru un mois avant son suicide, à 30 ans, l’hiver 1963.

Mais elle ne se montre pas seulement obsédée par l'idée d'imposture, par les turpitudes qui exploseraient, obscènes, si son masque tombait. Elle est aussi hantée par le désir de faire plus et mieux: «Il faut que je dépasse mes limites les unes après les autres.» Il faut écrire quatre pages par jour, il faut apprendre l'allemand, il faut «lutter pour se faire une bonne vie», il faut être plus forte que Virginia Woolf en matière de prose, il faut être la plus grande poétesse d'Amérique. «Je voudrais une vie conflictuelle, écrit Sylvia Plath, un équilibre entre les enfants, les sonnets, l'amour et les casseroles sales. Et affirmer la vie, de manière fracassante, sur les pianos et les pentes de ski, et aussi au lit au lit au lit.» Elle a toujours envisagé de concilier «livres, bébés et boeuf en ragoût», et pense y parvenir après avoir épousé Ted Hughes. Ce «mari beau, b