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Libération
Critique

Céline, ouvrage d'infection.

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Réédition de la thèse de médecine du docteur Destouches, où, sous le style, pointent les obsessions de l'auteur de «Bagatelles pour un massacre».
publié le 6 janvier 2000 à 22h07

Comme chacun sait, à force d'écrire des choses horribles, les choses

horribles finissent par arriver. Chacun aura également remarqué que tous nos amis auteurs de mémoires et autres thèses de doctorat choisissent en général un sujet de recherche assez proche de leurs angoisses personnelles (par exemple: «Anorexie et cadavre exquis: l'apport de la tradition orale au premier surréalisme» ou «Durcissement du Ti-6Al-4V et nitrure de bore hexagonal utilisé comme film lubrifiant: tests de conjonction»). Céline n'échappe pas à la règle. Le bon docteur Destouches, médecin des pauvres (l'hagiographie rappelle qu'il dédaigna sa pratique citadine au profit de divers dispensaires, à Clichy, à Bezons), eut, lui aussi, on s'en doute, sa thèse à rédiger.

La vie et l'oeuvre de Philippe Ignace Semmelweis, soutenue en 1924 fut publiée en 1936, dans la foulée de Mort à crédit et un an avant Bagatelles pour un massacre. L'oeuvre essentielle du médecin hongrois Semmelweis (1818-1865) s'intitule «L'étiologie de la fièvre puerpérale». Bien. Qu'est-ce que la fièvre puerpérale? Une infection du nouveau-né contractée dans l'utérus maternel. Qu'est-ce que l'étiologie? La recherche des causes des maladies, la généalogie du crime, en quelque sorte. Jusque-là, ça n'a pas l'air extraordinaire. On note cependant déjà une grande qualité littéraire, mais dans un registre moins survolté que la suite de l'oeuvre, plus soucieux de la «belle» cadence, même si quelques points de suspension, quelques phrases nominal