Le recueil d'articles récents de Jürgen Habermas concerne la part la plus exotérique de sa réflexion, celle même dont témoigne la réédition récente de ses Écrits politiques (1). Ce précédent recueil, dont les originaux ont été publiés de 1981 à 1990, attestait déjà l'engagement du philosophe dans les débats politiques de son pays. On regrettera que cette édition de poche se contente de reprendre à l'identique la traduction de 1990, sans faire au lecteur la charité de quelques notes qui pourraient pallier les inévitables déficiences de sa mémoire quant aux péripéties politiques d'un pays étranger pendant une période historique qui s'éloigne. La plupart des interventions de Habermas, alors, étaient centrées sur ce qu'on pourrait appeler la «question allemande», laquelle se trouvait en jeu aussi bien dans la querelle des historiens «révisionnistes» que dans la problématique ouverte par la chute du Mur et la réunification.
Les nouveaux essais politiques de Habermas aujourd'hui traduits ne font pas que s'inscrire dans la suite chronologique des précédents. Ils prennent acte d'une mutation qui, pour n'avoir été complètement imprévue, a fait basculer radicalement la perspective a priori depuis laquelle la réalité politique peut être saisie. C'est une ironie de l'histoire que l'Allemagne à peine réunie en un Etat-nation qui est simultanément un Etat de droit constitutionnellement pacifié soit confrontée à l'épuisement historique de cette forme politique. La construction étatique a co