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Libération

A propos des «affaires autrichiennes» et du climat alpin.

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par Pierre BOURGEADE, écrivain
publié le 19 février 2000 à 22h43

Le fascisme des gentianes

Dans les années 70, il y eut un film dont le titre aurait dû nous mettre la puce à l'oreille et qui s'intitulait Scènes de chasse en Bavière. Les gentianes, les clochers à bulbe, les troupeaux de vaches surnourries, les paysannes en «dirndl» et les tavernes au décor rustique: apaisant et confortable à la fois, digne de l'adjectif allemand «gemütlich» ­ intraduisible en français ­ tout cela évoque pour nous un «retour» à la pureté des cimes. Le blanc immaculé des neiges: notre virginité perdue" Les Alpes sont pour nous symbole de l'équilibre, de l'harmonie et de l'enfance. On se demande pourquoi! Car quoi de plus borné, de plus conformiste et existentiellement réactionnaire que l'esprit alpin? Ne nous y trompons pas, Haider, comme Blocher en Suisse, sont les fils de la montagne, de la montagne verdoyante, plantureuse et opulente. Il y a une singulière inclination des régions germaniques des Alpes, le Tyrol italien y compris, à vivre dans le confinement intellectuel. Montesquieu eût sans peine établi un parallèle entre le cloisonnement géographique des vallées alpines et le conformisme frileux des hommes qui y vivent. Et il n'eût pas eu tort! Qu'on se souvienne des dérapages ultraserbes d'un Handke, lui aussi fils de Carinthie, ou de ceux, d'un nationalisme effarant, de Botho Strauss, et l'on conviendra aisément que la montagne n'est libératrice que pour ceux qui n'y habitent pas. De Hitler, né à Braunau-am-Inn, bourg pimpant tapi au pied des Préalpes bavaroises ­ d'où est ori