Du catholique d'Irlande du Nord, de tout temps et en tout lieu,
c'est une plainte qui est montée vers nous. Grande famine, écrasement militaire, ségrégation politique, exclusion sociale, humiliation vivace et résistance acharnée ont peu à peu dessiné une géographie de l'espace, réel ou onirique, dans lequel nous admettons les nationalistes irlandais.
Mais en face? Chez les protestants? Quoi, hors de l'éructation pathologique d'un pasteur Ian Paisley et d'une imagerie paresseuse mêlant chapeaux melons et fifres guerriers? Qu'y a t il derrière «la citadelle assiégée», quel imaginaire à l'abri des murailles de l'unionisme ulstérien? Depuis novembre 1985 et la reconnaissance administrative par Londres et Dublin de «deux grandes traditions» nord-irlandaises, l'une nationaliste (catholique) et l'autre unioniste (protestante), certains protestants d'Ulster commencent à explorer leur histoire identitaire. Pour l'enseignant et chercheur protestant Wesley Hutchinson, il semble même que nous assistions à la mise en place «d'un véritable chantier culturel, caractérisé à la fois par une continuité par rapport aux préoccupations traditionnelles de la communauté britannique d'Ulster et par une disposition à explorer de nouveaux possibles». Remise en cause fondamentale, Hutchinson ose le mot de «désenclavement», qui s'attaque aux «stéréotypes réducteurs que certains cherchent à imposer sur l'unionisme». En fait, et le propos semblait relativement étranger à leur tradition, il s'agit aujourd'