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Libération
Critique

Scènes de chasse à Libidissi. Un faux roman d'espionnage dans une ville gardienne dépravée de la pureté de la race. Premier roman. Georg Klein, Libidissi, Traduit de l'allemand par Philippe Giraudon. Denoël, 254 pp., 130 F.

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par Cécile MOSCOVITZ
publié le 9 mars 2000 à 22h58

Un homme à abattre: l'intrigue de ce faux roman d'espionnage tient

en peu de mots. Le Bureau central fédéral veut éliminer son espion en poste à Libidissi. Il faut dire qu'il s'est un peu laissé aller à ses activités interlopes, dans cette ville à la chaleur insalubre. Ses réseaux personnels l'informent du programme. «Je n'ai appris que la nuit dernière qu'il devait arriver dans les deux jours. Ma paupière gauche, que les années de service à l'étranger ont fatiguée, tremble quand moi = Spaik, je me représente avec terreur l'homme qui doit me succéder...» Cette équation récurrente ­ «Moi = Spaik» ­ a un arrière-goût psychotique. L'impression se confirme lorsqu'on découvre qu'il n'y a pas un mais deux killers, formant un couple d'hermaphrodites amoureux. «Nous aimons tous deux la fraîcheur de l'exceptionnel, la claire lumière de l'instant fatal.» D'une voix gémellaire, il(s) rapporte(nt) les faits comme on cisèle une ode. En alternance avec le monologue de leur proie, lui aussi variablement lyrique et impersonnel. Ainsi découvre-t-on la ville par le jeu de leur mélopée imbriquée, dans un phrasé aussi contrôlé que Libidissi est excessive. C'est elle la pièce maîtresse du roman, la ville que le Grand Gahis a fanatisée contre la «puissance étrangère» avec sa bible en neuf cassettes vidéo. Comme on dit là-bas: «Mieux vaut mettre la tête dans l'anus d'un chien que le nez dans la pestilence du vent d'ouest.» Libidissi: ses maisons d'argile bleue, son quartier des plaisirs, ses pogr