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Libération

Salon du livre. Abidjan, pillage de piles. Victime des émeutes durant le coup d'Etat, Jacqueline Sirera doit tout recommencer.

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publié le 16 mars 2000 à 23h34

Abidjan (Côte-d'Ivoire), de notre correspondante.

Jacqueline Sirera est encore sous le choc. Elle montre les rayons à moitié vides, sort les photos de la librairie après le pillage de la nuit de Noël: vitrines fracassées, meubles renversés et plus le moindre livre. «Ça été terrible. En quelques heures, tout est par terre. Douze ans d'efforts et d'espoirs engloutis, juste au moment où je savais que j'avais gagné mon pari.» A la faveur du coup d'Etat qui a renversé le président Bédié le 24 décembre dernier, les soldats et la population ont fait main basse sur de nombreux magasins d'Abidjan. La librairie Arte'Lettres, installée dans un petit centre commercial flambant neuf à Riviera, un quartier résidentiel, a fait les frais des deux jours de désordre qui ont suivi le putsch. Sa propriétaire y a perdu sept mille titres en magasin et se retrouve avec 300 000 francs de dettes. Sonnée mais pas abattue, elle retrousse les manches, décidée à repartir.

Pour cette ancienne professeur de lettres franco-ivoirienne, «le parcours du libraire est un parcours du combattant» et ce ne sont pas quelques mutins et maraudeurs qui la feront renoncer. Quand elle a quitté le lycée classique d'Abidjan, en 1988, pour ouvrir sa première librairie dans un petit local passablement poussiéreux et sans climatisation, sans autre fortune que ses maigres économies d'enseignante, Jacqueline Sirera y croyait. «Pour moi, le travail du libraire relève de la promotion du savoir et des idées. Je vends des produits