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Libération

Salon du livre. Port-au-Prince, rue des Miracles. Deux familles et quatre librairies se partagent le marché dans la plus vieille république noire du monde.

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publié le 16 mars 2000 à 23h34

Port-au-Prince (Haïti), envoyé spécial.

Le commerce du livre, en Haïti, est une affaire de familles où l'on se livre de très filiales concurrences. Il y a les Auguste et les Lafontant. Le père de Gérald Auguste, de la librairie Auguste (rue du Centre à Port-au-Prince), la plus grande du pays, avait épousé une dame Lafontant qui encouragea Daniel, son frère, avocat et enseignant désoeuvré pour cause de dictature (papa Doc régnait à l'époque), à fonder sa propre enseigne. Ce fut la Pleiade, sise depuis trente-cinq ans au 83, rue des Miracles.

Les fondateurs ont engendré des petits libraires. Gérald donc côté Auguste, et chez les Lafontant, deux filles, Solange et Monique. Ce qui donne quatre librairies une génération plus tard: deux au centre historique et commercial de Port-au-Prince, et deux surgeons à Petionville, la banlieue à peu près chic perchée dans la montagne, loin des miasmes de la capitale. Solange Lafontant, la grande soeur (50 ans), est restée dans la maison mère. Monique, la cadette (45 ans), a inauguré il y a neuf ans «la Pléiade 2». Les deux librairies soeurs illustrent jusqu'à la caricature tous les contrastes de la réalité haïtienne. Le siège historique est un long couloir d'une vingtaine de mètres d'équerre à la rue, avec une étroite façade asphyxiée par la haie des commerces informels qui ont envahi les trottoirs: vendeuses de soupe, marchandes de bricoles ou de vêtements «pépères» (1). Le vacarme de la circulation est assourdissant, la chaleur poisseuse. U