«(la Grande-Caissière du bordel du maître B, de nuit, à un ouvrier
entrant:) "l'jiarret boueux, l'orbit'empossiarée, ta poitrin'm'trembler, l'comptoir caiss', ta mâchoir', a'c, mes chieveux chiauds,/d'ö, l'hors bordel, banlioue?, Franç'?, m'dehanchier, gars, tes cent-un kilogs chantants, quaqu'banquet celest'?, / d'quà ta faç'mâchiurée d'chiarogn'rat l'relent l'tueur en refaufiler sa lam'd'dans sa taill'! , / l'mouchiassat t'en rentrer s'assoupir dedans tes narin'!» Pour lire le nouveau livre de Guyotat, il faut être deux. Un qui lit à voix haute, et l'autre qui écoute. La déstructuration de la syntaxe, les néologismes et la graphie plus ou moins phonétique passent mal par les seuls yeux. On est obligé d'éprouver le mot à mot par la bouche, de laisser le verbe se faire tactile, sensuel. Comme on n'est pas toujours deux, les éditeurs ont eu la bonne idée de joindre au texte un enregistrement de trente-huit minutes, réalisé le 5 janvier dernier dans le cadre des «revues parlées» de Beaubourg, où l'auteur lit les vingt-quatre premières pages de son livre. On en conclut donc qu'il faut un peu plus de vingt et une heures pour achever la dégustation de Progénitures.
Les oeuvres de Guyotat sont rares. Progénitures a ainsi été couvé pendant neuf ans. La troisième partie du livre, en gestation, paraîtra plus tard. D'autres fleuves monstres (Histoires de Samora Machel) sont annoncés depuis plus de quinze ans. On se rappelle que son troisième opus, Eden, Eden, Eden, avait été censu