«Neuf fois je suis allé en Allemagne, six fois je suis passé en
Espagne, sept en Italie, dix fois je suis venu aux Pays-Bas, quatre fois en temps de paix ou de guerre je suis entré en France, deux en Angleterre; deux autres fois je suis descendu en Afrique, ce qui fait au total quarante voyages sans compter de moins longs parcours, mais fort nombreux, que j'ai faits pour visiter les pays et les îles de mes autres royaumes. Pour ce faire j'ai traversé huit fois la Méditerranée et trois fois l'océan d'Espagne. Je vais le traverser une quatrième fois pour m'aller enterrer.» Dans le discours qu'il prononce à Bruxelles, le 16 janvier 1556, au moment de son abdication, Charles Quint s'adresse autant au parterre en larmes de tout ce que compte l'«empire où le soleil ne se couche jamais» qu'aux historiens à venir. Méticuleux et lucide, comme à son habitude, ce «bagnard de la puissance», selon la définition de Fernand Braudel, souligne une dernière fois que son temps s'est consommé dans l'espace, ayant passé un quart de sa vie en voyage. Plusieurs ouvrages viennent marquer le cinquième centenaire de la naissance de Charles Quint. Tout d'abord, une monumentale biographie à quatre mains et deux parties, signée par Pierre Chaunu et Michèle Escamilla chez Fayard; un somptueux livre illustré chez Actes Sud avec des contributions de grande valeur sur les diverses facettes de cet «homme univers», notamment d'Immanuel Wallerstein sur le rapport entre la crise de l'empire-monde et la naissance