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Critique

Le camp du Sicilien. Publication du tome II des oeuvres complètes du Palermitain de Paris Leonardo Sciascia (1921-1989), fidèle aux Lumières et rétif aux appareils. LEONARDO SCIASCIA. oeuvres complètes II. 1971-1983. Edition établie, préfacée et annotée par Mario Fusco, Fayard, 1 362 pp., 390 F.

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publié le 30 mars 2000 à 23h12

Peut-on être sicilien et parisien à la fois? Y a-t-il une manière

viable de se mouvoir comme un intellectuel des Lumières et rester fidèle aux raisons du coeur ancestrales? Oui, comme le montre la vie et l'oeuvre de Leonardo Sciascia (1921-1989), pour qui ce va-et-vient entre des cultures et des temporalités différentes était sa façon à lui d'être contemporain et, finalement, d'éprouver ce qu'être citoyen veut dire en Méditerranée, voire dans n'importe quel sud du monde. De Leonardo Sciascia paraît aujourd'hui le tome II des oeuvres complètes que suivra un troisième et dernier volume. Sauf pour quelques textes inédits, cette édition reproduit les traductions des ouvrages déjà parus en France, mais Mario Fusco (qui, par ailleurs, en a signé certaines) les fait précéder d'un fort utile appareillage de préfaces et de notes.

Deux livres ont marqué l'adolescence de Sciascia, le Paradoxe sur le comédien, qu'il a relu sans cesse, et les Misérables, qu'il n'a plus ouvert depuis, bien que ­ comme il écrit dans Mots croisés ­ il sait devoir infiniment plus à Hugo qu'à Diderot: «Ma crainte de le relire réside peut-être dans la grandeur de ce que je crois y avoir appris ­ crainte que mon esprit d'adulte puisse, en le relisant, l'appauvrir et m'appauvrir, me faire apparaître comme faux ce qui pour moi, en moi fut vrai. "Il est un point où les malchanceux et les perfides s'unissent et se confondent en un seul mot; un mot fatal: les misérables. A qui la faute? Je crois que j'ai tourné toute