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Libération
Critique

La traite d'une Blanche. A New York, entre exotisme et réalisme, les démêlés tragiques d'une tapineuse repentie. Charyn & Loustal. White Sonya. Casterman, 64pp., 68F.

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publié le 6 avril 2000 à 0h14

Sonya a l'air d'être la seule Blanche (parmi les détenues) à la

prison d'où elle sort au début de l'album. Elle ne veut pas se réinsérer professionnellement malgré les nombreuses propositions, financièrement alléchantes, qui lui sont faites: pour elle, fini le tapin. Mais la vie est compliquée hors de prison. L'amour, l'argent, on perd vite ses repères. C'est encore chez les Noires que Sonya, la «petite soeur blanche», vengée, est le plus à l'aise.

Charyn et Loustal avaient déjà exploré ensemble l'imaginaire américain dans les Frères Adamov. New York est ici le décor d'une intrigue à la fois exotique et réaliste, comme le dessin de Loustal. On parle peu dans White Sonya. Les gestes des personnages, leurs rictus, leurs positions dans un espace qui les dépasse, en disent plus. On gifle et on fouette plus facilement qu'on ne sort une phrase: à chacun sa façon de s'exprimer. «Ne t'avise plus jamais de me gifler devant mes hommes», est-il dit à Sonya, comme on lui dirait «Surveille tes mots en public». Ce n'est qu'en privé qu'on règle son compte à un parrain.

La réussite de l'album tient aussi à la distance à laquelle Charyn et Loustal tiennent leurs personnages, les bons et les méchants. C'est de là, paradoxalement, que naît l'émotion, de cette espèce de mise à plat, comme si Sonya et ses acolytes devenaient de petites unités de romanesque lâchées dans un album dans lequel le scénariste et le dessinateur, sans scrupules, utiliseraient leurs destins pour la satisfaction de leurs le