Que faisait-on le 15 mai 1995? Il faisait sûrement beau, le
printemps, presque chaud. «Une journée magnifique. Personne ne peut mourir par un jour pareil!» Au Caire, «Doniazade est née le15 mai 1995 à trois heures et demie. Elle est morte le soir du 16 mai 1995.» Et May Telmissany n'a pas «guéri d'elle», de sa fille morte. «Je me souviens encore. Bien des choses que je tais. A présent mes seins pendent inutiles. Et je me dévêts en tournant le dos au miroir.» Lorsqu'elle relit aujourd'hui son petit livre intense, May Telmissany retrouve la même douleur comme une braise qu'on ravive.
Doniazade. Un prénom tiré des Contes des Mille et Une Nuits. «Elle a passé une seule nuit à l'hôpital. Et les mille autres? Je les passe à me souvenir d'un nom que je n'ai prononcé qu'une fois. Peut-être deux.» Il a fallu ce livre pour que Doniazade puisse enfin vivre. Et mourir. Thrène à la mémoire d'une enfant défunte.
«En écrivant, j'avais conscience qu'il fallait que je me débarrasse de cette tristesse qui sortait par tous les pores de ma peau, dit aujourd'hui May Telmissany. Je voulais garder une trace de notre vie commune». Ecrire pour «acquérir des défenses immunitaires contre la perte, contre la résignation à la fatalité, contre l'attente». «Lentement, un instant se décolle du passé. Je consolide mon coeur, l'étaie de planches de bois pour l'empêcher de tomber.»
Doniazade est un roman polyphonique: il y a la voix de la narratrice, et aussi celle de son mari, poète «mon premier lecteur, la s