Les Pouvoirs de la littérature nous promène dans un XVIIe siècle
littéraire peu fréquenté: Corneille et Racine ne font ici que de brèves apparitions, pas l'ombre de La Bruyère, La Fayette ou La Fontaine. Christian Jouhaud se concentre sur les écrivains qui produisirent l'essentiel de leur oeuvre sous Louis XIII: Théophile de Viau, Jean-Louis Guez de Balzac, Charles Sorel, quelques autres moins connus. L'historien ne fait pas une histoire littéraire classique qui compilerait les destins, les oeuvres et les thèmes. Son projet est d'étudier la façon dont les écrivains du temps se sont arrangés avec le pouvoir, quelles stratégies esthétiques et sociales ils ont mis en place pour se construire un espace de liberté à l'intérieur du système politique. Le nom de Pierre Bourdieu n'est cité qu'une seule fois par Christian Jouhaud, mais l'analyse stratégique qu'il mène ne pourrait avoir lieu si elle n'empruntait nombre de concepts au sociologue, dont ceux essentiels de capital symbolique, de champ, de position ou de classement.
Au début du XVIIe siècle, le champ littéraire est loin d'avoir atteint son autonomie. Le droit d'auteur n'existe pas. Les classes cultivées ne sont pas assez nombreuses pour former une opinion publique libérant l'écrivain des contingences du pouvoir. Se choisir un protecteur, c'est à la fois se prémunir de la misère et se protéger contre la vindicte de religieux tatillons ou de puissants outragés. Cela ne suffit pas forcément, mais cela peut aider. Théophile en f