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Libération
Critique

Ames canines. Chiens facétieux, délirantes aventures spatio-temporelles et trajectoires en trompe-l'oeil: une leçon de «steam-punk» par miss Connie Willis. Connie Willis. Sans parler du chien. Traduit de l'américain par Jean-Pierre Pugi. J'ai Lu, «Millénaires», 536 pp., 89 F.

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publié le 4 mai 2000 à 0h37

Sans doute n'est-il pas superflu d'indiquer au lecteur potentiel du

dernier roman de Connie Willis que le titre même de son livre est emprunté au sous-titre de Trois hommes dans un bateau, de l'humoriste anglais Jerome K. Jerome, roman qui, dès sa parution en 1889, fut un best-seller des deux côtés de l'Atlantique, au point que son auteur fut sommé d'en écrire une suite sous le titre de Trois hommes en balade. Les héros de ce petit trésor d'humour farceur mais aussi absurde étaient en vérité au nombre de quatre, puisque, au narrateur et à ses amis londoniens George et Harris, ayant décidé de voguer pour leur plaisir sur la Tamise, s'ajoutait un fox-terrier du nom de Montmorency.

Le protagoniste de Connie Willis, Ned Henry, est, quant à lui, pourrait-on dire, un anachronaute, puisqu'il appartient à une équipe d'historiens américains voyageant dans le temps à la recherche d'objets ayant joué un rôle déterminant dans l'évolution de l'Histoire. Sans parler du chien est donc ce qu'il est convenu d'appeler un roman steam-punk, sous catégorie de la science-fiction moderne appliquée, entre autres, à bâtir des intrigues mettant en scène des personnalités du XIXe siècle, de façon généralement échevelée, art dans lequel l'Américain Tim Powers est passé maître. Connie Willis a pris le parti de s'adapter à son modèle, au point de singer les têtes de chapitre et la manière insolente et libre de Jerome K. Jerome, tellement moderne lui-même qu'il n'avait rien à redouter d'une pareille intrusi