«Pour me faire plaisir tu pourrais dézinguer une chèvre?» La
première phrase de Pour de faux, de Cécile Musitelli et Natali, est un écho punk du Petit Prince de Saint-Exupéry. Le traitement des histoires pour enfants a changé de ton, du moins dans la collection «Tête de lard» aux éditions Thierry Magnier, fondées en 1998.
Cécile Paris, dans son album Souvenirs de Paris, photographie des couples qui riment (ce qui n'est pas si courant): «une boîte de pastilles» et la Bastille, «un morceau de jambon beurre» et le Sacré-Coeur, «une lettre d'amour» et Beaubourg. Galotta, dans Bonhomme bonhomme, invente des sons ronds, «grobinet», «crabuche», pour un quotidien carré, et Voutch une grenouille très curieuse, toujours à demander Pourquôôââ.
Dès le titre, le dernier album d'Antonin Louchard (qui dirige la collection) pose la question: L'as-tu vu? Un enfant commence son récit: «C'est ma soeur qui l'a oublié», et le poursuit sans l'expliciter pendant neuf pages, le livre en a dix. L'histoire est à tiroirs. A droite, les portraits de famille, naïfs aux nez plus ou moins rouges et cils dessinés trait par trait comme des rayons de soleil noir. A gauche, des objets, parapluie, tambour, chaussures, au graphisme sépia précis et réaliste. Ils caractérisent les personnages mais déroutent à la fois, tant leur lien avec eux semble distendu. Leur présence est ambiguë. Si on peut raisonnablement associer Mémé avec «talons hauts», et l'imaginer en danseuse de flamenco ou de tango, Pépé avec «chaise