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Libération

L'enfer de Dantec. Par l'auteur des «Racines du mal», nourri des événements en cours, un patchwork proliférant, polémique et toxique, sur l'apocalypse à venir. Maurice G. Dantec, Le Théâtre des opérations, Gallimard, 647 pp., 125 F.

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publié le 25 mai 2000 à 0h41

«Journal métaphysique et polémique»: le sous-titre du quatrième

livre de Maurice G. Dantec annonce d'emblée la couleur, et l'ambition. Pendant l'année 1999, à peine installé à Montréal, l'auteur de la Sirène rouge, des Racines du mal et de Babylon babies a tenu la chronique agitée d'une fin de siècle. Placé sous le signe de Kierkegaard («L'individu ne peut ni aider ni sauver une époque, mais seulement constater sa perte»), ce journal mêle vie privée (quelques images d'enfance, l'expérience des drogues, la vie de famille), observation des événements en cours (la guerre au Kosovo, essentiellement), poésies et aphorismes, considérations sur le travail d'écriture et la vie littéraire, et surtout, spéculations de tous ordres, autant scientifiques et philosophiques qu'historiques et géopolitiques. Le tout forme un gros patchwork foisonnant, débridé, proliférant, à l'image du tempérament de l'écrivain: passionné, bagarreur, vindicatif, tourmenté, excessif. De ce «désordre baroque», Dantec a voulu faire «une tentative de récit généalogique de toutes les guerres en cours, y compris celles qui se gagnent ou se perdent en ce moment même il y a des milliers d'années, ou celles qui surviennent déjà dans les prochains siècles».

De la paléontologie à l'astronautique, d'Homère à la physique quantique, de Gilles de Rais aux camps de la mort, l'auteur brasse, malaxe intuitions personnelles, connaissances accumulées et lectures boulimiques du moment. On sent un désir de prendre à bras le corps