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Libération
Critique

Le cas Sandor.

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La correspondance agitée entre Freud et Ferenczi, son plus aventureux disciple et ami. Fâcheries, bouderies et différends théoriques.
publié le 25 mai 2000 à 0h49

Vous êtes, lui avoue Freud, «mon paladin, mon grand vizir secret».

Ses lettres commencent par «Cher ami» et se terminent par «votre Freud» ou «votre fidèle Freud». Le vizir signe «votre Ferenczi», parfois «votre dévoué Ferenczi», et dit toujours «Cher Monsieur le Professeur». Entre 1908, année où Freud, tellement impressionné par le jeune Hongrois qu'il venait de rencontrer, l'invite ­ fait exceptionnel ­ à venir le rejoindre sur son lieu de vacances, à Berchtesgaden, et le 4 mai 1933, date à laquelle Ferenczi, très affaibli, envoie son dernier mot («je m'efforce de croire aux déclarations optimistes de mes médecins»), plus de mille deux cents missives sont échangées, une par semaine, durant vingt-cinq ans. C'est peu de dire qu'elles constituent une source documentaire exceptionnelle, aussi bien pour l'histoire de la psychanalyse, les vicissitudes de son institutionnalisation, la mise en place de ses techniques ou de son appareil conceptuel, que pour la biographie intellectuelle, voire intime, de son fondateur et de l'un de ses plus aventureux pionniers.

Le troisième et dernier volume (1) de la Correspondance Sigmund Freud-Sandor Ferenczi couvre les années 1920-1933: des «années douloureuses» en effet, pour l'Europe en général, à peine sortie de la guerre et que vont bientôt menacer crise économique, fascisme et nazisme, pour le mouvement psychanalytique, qui ne s'amplifie qu'au milieu des polémiques, pour Freud et Ferenczi en particulier, frappés par le deuil de proches ou l