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Libération

Le beau et la bête

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publié le 20 juin 2000 à 1h39

Dans la cage aux images de Droits d'auteur (la Cinquième, dimanche), un énorme plantigrade littéraire se passe régulièrement la patte sur le visage, massant sa vieille peau et son nez comme de la pâte brisée: l'écrivain américain Jim Harrison.

De l'autre côté de la table, un élégant criquet mondain et appliqué lui pose de subtiles questions, ayant bien révisé son programme pour la mise en chaire et lu tous les livres: le journaliste Frédéric Ferney. Le succès de Harrison en France tient à deux mots, nature et démesure, et à deux fantômes, London et Hemingway. Ce succès est mérité: lisez ses premiers romans, dont le touchant Légendes d'automne, que la collection "Bouquins" a réunis; le vent de la plaine y porte le souffle au coeur de personnages solitaires, puissants, fragiles, finalement détruits, que l'écrivain exhume de ses rêves, de ses cauchemars, comme des carcasses de dinosaures. Ferney a une explication à ce succès. Il l'a écrite et la lit à l'écrivain en plissant les yeux: "Dans vos livres, vous semblez entrer en trombe comme un sanglier, et puis tout à coup vous avancez à pas de mésange ou comme un chardonneret..." On sent qu'il a sué sur la métaphore et que, pour faire honneur, il a sorti la nappe blanche et mis les petits mots dans les grands. Il parle aussi l'anglais comme à Oxford et ne souhaite pas qu'on l'oublie: il pose ses questions en VO, puis se double lui-même en voix off (l'émission a été enregistrée). Il sait tout faire, Ferney, seul, sur son trente et u