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Libération
Critique

Nouvelles fleuve

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Par un Polonais né en 1960 et devenu auteur culte, un cheminement de nouvelles comme autant de stations du calvaire de vivre.
publié le 29 juin 2000 à 1h56

La quarantaine, la plume sèche d'un Carver polonais introspectif mâtinée d'effluves enfiévrées d'un Bukowski du cru, Andrzej Stasiuk apparaît comme un vagabond des lettres polonaises, circulant dans les contre-allées du postcommunisme de la Pologne catholique avec un regard cow-boy fin de siècle féru en désespérance. Premier ouvrage à être traduit en français, Par le fleuve est un cheminement de nouvelles comme autant de stations du calvaire de vivre où un unique narrateur part d'une enfance de catéchisme pour atteindre un âge adulte mais incertain où l'église est moins un lieu de ferveur qu'un point de repère géographique et une aire de repos, un prosaïque refuge comme un autre: lit, bar ou air de rock. On est loin d'une littérature polonaise contemporaine qui, de Milosz à Konwicki ou Herbert, constitue le corpus commun d'une poétique. On est loin aussi de Solidarnosc.

Dans ce road-movie à travers la Pologne, on circule entre deux errances, deux verres, au milieu d'une vie qui, faute de direction, prend la route. Dans un escalier, Nadia, se retourne. "- Qu'est ce que tu regardes? Mes jambes ou mes fesses? - Je regarde avec nostalgie le passé et avec inquiétude mon avenir. - Alors regarde plutôt mon cul."

En Pologne, Stasiuk (né en 1960) ex-cancre, ex-anar, ex-déserteur, fait l'objet d'un culte, des jeunes femmes écrivent des thèses sur son oeuvre et viennent frapper à la porte de sa maison dans le village reculé où il vit désormais avec femme et enfants et où il a fondé sa pr