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Libération
Critique

Sur tous les fronts

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Un étude épistémologique sur la phrénologie qui entendait, à partir de l'étude des crânes, percer les mystères du comportement humain.
publié le 29 juin 2000 à 1h57

C'est par l'examen minutieux de nos crânes que la phrénologie, ou "science des bosses", espérait percer le secret des comportements humains. Car le crâne, soutenait-elle, en épousant très fidèlement la forme du cerveau, traduisait chacune de ses 35 fonctions spécifiques, de l'instinct de la reproduction à la maîtrise des chiffres, du goût pour la musique au penchant pour le meurtre. Invention du médecin viennois François Joseph Gall, elle connut son heure de gloire dans le Paris des années 1830, où "cranomètres" et moulages de têtes faisaient fureur, avant d'être progressivement remisée au cabinet des curiosités scientifiques, des pratiques fantaisistes ou du charlatanisme. Comment aborder en historien des sciences un tel objet, se demande Marc Renneville dans le Langage des crânes? En prenant simplement ses acteurs au sérieux et en se gardant de tout triomphalisme rétrospectif, répond en substance son ouvrage.

Celui-ci vaut d'abord pour le récit très informé qu'il propose de cette "doctrine des bosses", née en Autriche dans les années 1790, abandonnée à Paris à la veille des révolutions de 1848. Il dit le rôle de Gall, premier à mettre au point une cartographie des localisations cérébrales et de leurs fonctions respectives, celui de ses amis ou disciples (Fossati, Dumoutier, Spurzheim, Broussais, Benjamin Appert), médecins ou philanthropes réunis après sa mort (1828) dans une très active Société de phrénologie, forte de 200 membres et d'une impressionnante collection de crân