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Libération
Critique

Force de Loi

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Le journal de prison d'un braqueur intellectuel qui dérange le silence carcéral par son ""obscénité à raconter"".
publié le 6 juillet 2000 à 2h50

En 1976, Emmanuel Loi est arrêté pour hold-ups. A 26 ans, il écope de six années ferme. "Avec cinq transferts disciplinaires, aides à évasion, tentative d'évasion", il n'aura aucune remise de peine. Loi est loin d'être un âne. Les amis, amantes, parents qui lui écrivent en prison témoignent tous également d'un "capital culturel" certain. Le psychologue qui sommeille en chacun se demande ce qui peut amener un jeune bourgeois à faire son Robin des Bois. On pourra aussi gloser sur l'ironie lacanienne qui conduit un Loi en prison. L'auteur n'est pas trop dupe et n'erre pas trop: "Vivant sous un nom qui était celui de mon père jusqu'à ce que je le paie. A son prix. Le mien de nom parle, je ne l'ai pas acquis, je n'en suis pas quitte, il m'a fait trébucher, c'est une béquille, un piège et un serment. Maintenant, je le comprends."

D'ordinaire est le onzième livre d'Emmanuel Loi. On y relève une collection d'articles, l'Ecriture de peu (Bourgois, 1979), rédigés avant l'arrestation et en prison, et où il est déjà beaucoup question de ce que les noms font aux corps, réflexion poursuivie dans Une cure (Bernard Barrault, 1987). Mais ce sont aussi des récits où rôde le braquage: Voleur! en 1986 ou polar chez Fleuve Noir, le Onzième Commandement (1). Quant au texte de D'ordinaire, ce journal du voleur qui rédige un livre intitulé Chant d'amour (ça ne s'invente pas), Loi l'avait déjà présenté à Avignon en 1991 sous le titre Nu. Mais cette nudité est bien celle de la voix, de l'écrit. Pas qu