Avec ce roman, Meyer Levin, ancien correspondant de guerre et ami d'Hemingway, né à Chicago en 1906 et mort à Jérusalem en 1981, s'inscrit dans la tradition du "premier amour", à savoir de la première déception.
On est dans le Chicago de l'entre-deux-guerres, la capitale du jazz blanc: les clubs font bouger la jeunesse. On a le droit de prendre la voiture de papa et de sortir avec sa girl, mais il faudra se contenter d'un peu de pecking (bécotage) dans la pénombre des parkings. Frankie, diminutif de Frances, c'est la petite soeur de Steve, le meilleur copain de Johnnie. Frankie et Johnnie s'aiment mais ne peuvent s'aimer. Classique. L'american way of life de ces années-là vous autorisait à tout faire sauf ça. Mais pourquoi devoir se marier? Pourquoi ressembler à tous ces couples? "Une fois, par la fenêtre du métro aérien, [Johnnie] avait aperçu un homme et une femme déambuler dans une chambre à coucher. Un peu plus loin, on pouvait voir une salle à manger, la table mise pour les repas familiaux, matin et soir, soir et matin. Tous les jours, le même train-train, voilà ce que voulait dire, le mariage." Le mariage, ce pilier de l'institution middle-class, aussi triste qu'un tableau d'Edward Hopper. Entre-temps, lui devient mécanicien et elle standardiste, et toujours rien. Aussi les amoureux finissent-ils par se quitter. C'est Frankie qui, exaspérée par la monotonie des sorties et le désir de son fiancé, prononce le mot de la fin: "Je crois que je ne t'aime plus."
Le roman de Lev