Quand il y a une demi-douzaine d'années, l'écrivain mexicain Paco Ignacio Taibo II a publié L'année où nous n'étions nulle part, il y a eu des sceptiques. Certains se sont demandés comment les extraits
d'un journal du Che Guevara sur la guérilla calamiteuse qu'il menait au Congo, avaient pu sortir des archives cubaines et se retrouver dans ce livre. Aujourd'hui c'est l'intégralité des réflexions du révolutionnaire latino-américain sur cet épisode qui est libérée par sa famille avec sans doute la bénédiction du parti. Et on découvre un texte vif, sans formule diplomatique, qui tranche d'ailleurs avec la préface écrite par Aleida, la fille du Che, dans une langue de bois désarmante.
Mais revenons à l'époque dont il est question dans ce livre. Début 1965, Ernesto Guevara sait qu'il va quitter Cuba. Après le triomphe de Fidel Castro, dont il a été le lieutenant charismatique, après la révolution qui a suivi, il a fallu gérer le pays. Ce qui s'est révélé beaucoup moins enthousiasmant. Si l'Argentin est resté fidèle à ses options, s'il ne s'est pas laissé amollir par les délices du pouvoir, s'il est resté spartiate et incorruptible, on ne peut pourtant pas dire que son rôle a été positif.
Malgré sa bonne volonté, Guevara a été un piètre praticien du socialisme. Il a laissé mourir les libertés fondamentales (d'opinion, d'expression, d'opposition, etc.). Il a voulu lutter contre la bureaucratie mais a renforcé la centralisation de l'économie, c'est-à-dire qu'il s'est comporté comme un