Le Colloque des bustes ressemble à un moderne conte de Voltaire ou à une fable sollersienne dénigrant la société du Spectacle. On pourrait trouver son argument un poil outré, mais au fond, entre les hommes-troncs devenus objets d'art pour collectionneurs d'avant-garde (dans le roman) et les joutes de lancers de nains, ornement ultime des nuits en discothèque (dans la vie), on sent bien que la différence n'est pas flagrante. Le nouveau livre de Bernard Comment prend acte de l'état du corps dans nos sociétés: quelque part entre le bibelot et la marchandise. Le héros, qui a perdu bras et jambes suite à une maladie, est devenu oeuvre d'art chez Monsieur et Madame. Il a une conscience claire de sa situation: «Monsieur le dit parfois à ses invités, l'inconvénient de ses petits monstres, c'est que, une fois morts, ils ne valent rien, ce qui n'est jamais réjouissant pour un collectionneur vous en conviendrez, rire embarrassé de l'assistance, les regards se tournent vers moi, je souris.» Très affable, le héros, toujours très poli. Au fond, il a choisi son sort, c'était mieux que rester chez lui à encombrer sa famille. C'est sur ce ton exquis qu'il évoque sa situation, comme si ce discours courtois et dégagé allait accentuer la dureté de sa condition. Cela marche parfois mais pas toujours, et il arrive qu'on regrette le manque d'un peu de violence et de cruauté dans l'écriture de Comment.
La mode des hommes-troncs n'est pas la seule catastrophe ambiante. Ceux-ci viennent d'être réquisi