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Libération
Critique

Sportès, Morgan de moi

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Making of d'un précédent roman, «Solitudes» ne pèche pas par sa modestie. Mais ce n'est pas avec la modestie qu'on écrit de grandes choses.
publié le 12 octobre 2000 à 5h17

On lira Siam.Siam, le premier roman de Morgan Sportès, paru aux Editions du Seuil en 1982, non, on ne l'a pas lu, pas encore, il est en creux dans Solitudes, son dernier roman, c'est pour quoi, forcément, on le lira. On dit roman, puisque c'est inscrit sur la couverture, mais à aucun moment l'auteur ne feint de nous faire croire que ce récit diverge en quoi que ce soit du souvenir qu'il a de cette année (1979?, 1980?) passée à écrire un roman, situé au Siam, à Ksar Saïda au bord du désert algérien, au prétexte d'y enseigner le français. Une année de grandes Solitudes. Morgan Sportès nous laisse au bout de 160 pages dans le halètement de la parturition accomplie, il vient d'accoucher d'un roman de près de quatre cents pages, nous avons accompagné sa gésine pas à pas, nous sommes un peu les parrains de Siam, il a aujourd'hui vingt ans et nous l'avons laissé filer. On lira Siam.

Solitudes est le making of de Siam, pas seulement, c'est une année de vie, brute, sincère et sublimée, prise en marche comme un train, et abandonnée en route (le livre commence d'ailleurs par des points de suspension suivis d'une minuscule et finit de même). L'auteur et le narrateur sont confondus, il a trente-deux ans, et, volontairement il se laisse enterrer à l'orée du monde, dans un trou inatteignable: «Si je continuais sur cette voie, je serais un "raté", pas un raté social, je pouvais décrocher, en me battant un peu, un poste enviable dans un magazine, mais un intellectuel raté, un raté métaphysiqu