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Libération

Extension du domaine de la lune

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publié le 9 novembre 2000 à 6h22

Quand la folie s'introduit dans des romans policiers, qui plus que tous autres réclament du rationnel, elle se montre une maladie contagieuse et en fait peu à peu éclater le cadre. Selon le titre du roman de Thomas Bernhard où la démence a le plus sa place, elle crée quelque «perturbation». Chacun à sa manière, la Face cachée de la lune et la Femme sans tête sont ainsi deux textes perturbés, où les questions de départ se déplacent pour offrir au lecteur de nouveaux mystères à résoudre.

La Face cachée de la lune est le deuxième roman traduit en français de Martin Suter, Suisse allemand (comme Robert Walser, qui s'est retrouvé naturalisé allemand ici même la semaine dernière) né en 1948. Dans le premier, Small World, l'intrigue tournait autour d'un vieil homme qui se révélait victime de la maladie d'Alzheimer et dont personne, coupable ni lecteur, ne pouvait exactement savoir à l'avance ce dont il parviendrait à se souvenir des faits dont il avait été le témoin. Dans la Face cachée de la lune, qui se passe également en partie dans la plus riche société suisse, le héros est un grand avocat d'affaires aux ambitions apparemment plus que réalisées. «Mais, lit-on dès la troisième page, s'il lui fallait attendre des négociations secrètes entre entrepreneurs pour pouvoir jouir de nouveau, après des années d'abstinence, d'une promenade en forêt, c'est sans doute que quelque chose clochait dans son existence.» L'appel de la forêt va cependant se faire si fort que ça clochera de plus en