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Libération
Critique

Paris by night

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Allumage de réverbères, bal, noctambulisme et filles de joie sortant de l'ombre : une étude sur la vie nocturne électrique à Paris au XIXe siècle.
publié le 16 novembre 2000 à 6h39

Qu'on l'interprète comme un signe de dynamisme ou, à l'inverse, comme un symptôme de crise, l'élargissement du spectre de notre compréhension du passé semble être devenue l'un des enjeux majeurs de la recherche historique. Non seulement la gamme des objets étudiés ne cesse de s'étendre, mais les formes d'écoute ou d'interprétation se sont singulièrement compliquées. Ainsi l'analyse du «social» s'est-elle peu à peu enrichie de l'examen de clivages essentiels, mais longtemps négligés, comme les rapports de sexe ou les effets de classes d'âges. Elles s'est aussi renforcée d'une vigilance accrue à l'égard des perceptions, des représentations ou de l'environnement sensoriel qui étaient ceux des acteurs de l'histoire.ÊEt si les sociétés disparues n'étaient pas non plus compréhensibles sans la reconstitution de leur «architecture temporelle», de leurs découpes et leurs usages du temps, de ce qu'Alain Corbin appelait naguère «l'arithmétique des jours»? Tel est le point de départ de Simone Delattre qui, dans un livre magistral, montre tout le profit que l'historien peut tirer d'une attention soutenue à la nuit, à l'obscur, à ces Douze heures noires dont la tombée modifie en profondeur l'appréciation des choses.

C'est dans le Paris du premier XIXe siècle que l'auteur a choisi d'inscrire ses pérégrinations nocturnes. La période, en effet, est passionnante, rongée par l'inquiétude, la maladie urbaine, l'obsession de l'ombre et de l'opacité du monde, dont la littérature, Misérables ou Mys