On est en 1980. La République islamique d'Iran a tout juste un an et Marji en a dix. C'est l'année, aussi, où le foulard est devenu obligatoire à l'école, ce qui fait pester la petite fille habituée à une éducation très libre, à la fois laïque et française; ce qui ne l'empêche pas d'avoir la foi du charbonnier et de convoquer Dieu chaque soir dans sa chambre pour lui parler. C'est l'année, encore, où ses parents, de grands bourgeois de Téhéran, marxistes à l'iranienne comme on l'était à cette époque dans ces milieux et chauds partisans de la chute du Shah, commencent à déchanter. Marji, elle-même, avait manifesté à l'insu de ses parents contre le tyran. A cause du chagrin d'amour de sa nounou qui n'avait pu fréquenter le jeune bourgeois qu'elle convoitait. Car on est très à gauche dans la famille, mais pas au point, dans la vie quotidienne, de vouloir l'abolition des classes sociales. Sous ses yeux, la fillette voit donc se dérouler la petite et la grande histoire qui, souvent, se rencontrent. Bel épisode que celui où les manifestants récupèrent, lors de ses obsèques, le cadavre d'un vieillard décédé d'un cancer et décrètent qu'il a été tué par les sbires du Shah. La veuve proteste un moment puis se joint aux révolutionnaires, criant à son tour: «A bas le roi assassin.» C'est tout le charme de cette bande dessinée que de nous faire traverser cette période tourmentée et fondatrice d'un ordre nouveau à travers le regard innocent d'une fillette et de nous amuser en même tem
Critique
Le Shah bouté.
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publié le 23 novembre 2000 à 6h59