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Libération

En lieux et Place.

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Ethnologue de l'imaginaire, François Place publie le troisième et dernier tome de son «Atlas des géographes d'Orbae», un projet fou entamé en 1994.
publié le 30 novembre 2000 à 7h19

Sur la couverture du troisième et dernier tome de l'Atlas des géographes d'Orbae, d'infimes personnages, à gauche, montrent au loin un volcan, ou une île, on ne sait, séparé d'eux par une vallée, dit le texte, «où palpitait l'océan des herbes à nuage». On pense à ce tableau célèbre de Caspar David Friedrich, le Voyageur au-dessus de la mer de nuages, puis on pense à Kleist pensant à Friedrich: «Il est magnifique, dans l'infinie solitude d'un bord de mer, sous un ciel voilé, de porter ses regards sur une immense étendue d'eau déserte. Mais il faut pour cela s'y être rendu, devoir en repartir, désirer passer de l'autre côté, ne pas pouvoir, regretter l'absence de tout ce qui fait la vie et percevoir pourtant la voix de cette vie dans la rumeur des flots, le souffle du vent, la fuite des nuages, le cri solitaire des oiseaux.»

François Place confirme, d'un jeu de mot involontaire, que dans les paysages qu'il dessine, «on ne doit pas tout à fait avoir sa place». On y chemine, c'est certain, mais ils ne vous enrobent pas, ne vous servent pas de toit. Sans toit, mais pas sans loi, au contraire. Le projet de l'Atlas des géographes d'Orbae est né en 1994. Il s'agit, en suivant les vingt-six lettres de l'alphabet, d'imaginer vingt-six mondes (villes, îles ou pays), chacun pourvu de ses coutumes, de ses costumes, de son histoire, de ses histoires et chacun étant «cousu» dans un conte d'un genre différent. La forme de l'Atlas est stricte: chaque lieu est d'abord figuré par une lettrine q