On demande à François Place de commenter quelques planches du tome 3 de l'Atlas des géographes d'Orbae et il se perd dans les méandres d'une cité orientale, à la page 69. Il suit du doigt le dessin des rues: «En principe, sur l'original, on peut parcourir la ville comme on veut, mais là...» Quoique les reproductions soient pourtant «les meilleures possibles», l'artiste a l'air de redécouvrir à chaque planche qu'elles ne souffrent pas la comparaison. Ceux qui ont eu la chance de voir des aquarelles de Place (exposées jusqu'à ce soir dans différentes librairies parisiennes, dont le Divan, et bientôt à Langres, Montbéliard et Evreux) seront d'accord avec lui.
Mais c'est le destin des univers dérobés que de mourir au dévoilement: «A chaque fois qu'il presse la poire du déclencheur, les couleurs sur le mur s'évanouissent un peu plus, happées par l'appareil voleur de lumière, et la caverne retourne à ses ombres, dévorée d'obscurité.» Du «pays des Troglodytes», le photographe Hippolyte de Fontaride ne ramènera ainsi que des miettes de fantômes. Comme dans le Portrait ovale de Poe, comme dans Fellini-Roma, la libido sciendi, la connaissance avide, qui est aussi libido dominandi, désir de maîtrise, ne fait que détruire son objet.
C'est le thème majeur de ce troisième et dernier volume de l'Atlas. Dès le «pays de la Rivière Rouge», Joao, trafiquant d'esclave, échoue à rapporter le récit de son expédition car il se fait confisquer ses mots, «étranges coquilles d'obscurité sonore» dira-t-