Au fragment, à l'inaccompli, Walter Benjamin a voué son oeuvre de manière programmatique, de même qu'il avait placé sa vie sous le signe de l'errance. Aussi son suicide à Port Bou en 1940 alors que, âgé de 48 ans, il s'apprêtait à passer en Espagne pour s'embarquer vers les Etats-Unis et se sauver du nazisme n'a-t-il pas peu contribué à cette fragmentation «destinale». Enfin, la fortune de cette pensée aux mille ramifications est allée grandissant à la suite de la publication par Adorno en 1955 des Ecrits et a induit la multiplication des éditions critiques mais aussi les montages souvent aléatoires des membres restés comme désarticulés dans l'immense chantier benjaminien. Chacun pour soi, les ouvrages publiés aujourd'hui témoignent de cette situation. Ils sont de Walter Benjamin, mais celui-ci ne les a ni écrits ni publiés comme tels. Même pas Sens unique, le seul publié par ses soins en 1928, car l'éditeur français lui a adjoint dès sa première édition en 1978 Enfance berlinoise, une série d'écrits parus dans différents journaux entre 1933 et 1935 et réunis pour la première fois en volume par Adorno en 1950. Je déballe ma bibliothèque (dont le court texte donnant le titre a été par ailleurs abondamment traduit en français) est construit selon le même principe, recueillant des articles publiés dans des périodiques du vivant de l'auteur. OEuvres est la refonte de l'ouvrage publié en1971 avec le même titre par Maurice de Gandillac et organise les écrits benjaminiens s
Critique
Benjamin, dans la jungle des piles.
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publié le 7 décembre 2000 à 7h37
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