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Libération
Critique

La patte Calet .

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Les chroniques aux journaux de l'auteur de «la Belle Lurette», qui savait raconter sans se payer de mots.
publié le 11 janvier 2001 à 21h42

Entre le 3 mars 1904 et le 14 juillet 1956, Il y eut une première guerre, puis une seconde, des tambours cocardiers, des harangues de brasseries, des foules saccagées par la propagande, l'imposture, l'oppression. Et il y eut aussi Henri Calet. «Opposé à l'esclandre», ce contemporain des phrases vociférées et des discours criminels avançait dans la vie à mots blessés. Chez l'écrivain, comme chez le journaliste, ni dédain, ni cynisme, ni aucune de ces choses du dehors. Car l'auteur de Monsieur Paul,le Tout sur le tout ou l'Italie à la paresseuse était aussi chroniqueur pour journaux, attentif de Paris et des ombres de trottoir. A l'image de sa langue romanesque, Calet reporter respectait les mots. N'en faisait ni commerce ni étalage. Simplement, il racontait et, lui qui se disait «horrifié par le mépris», marchait en sympathie aux côtés des exclus. Car le Paris de Calet n'était pas n'importe quel Paris. Le sien, c'était la ville des pauvres. Une humanité toute laborieuse, toute modeste, toute chargée de fardeaux et aussi toute inquiète par ces choses modernes, métro, voitures, scooters, réclames, qui venaient barbouiller le souvenir du Paris d'avant. Il avait peur pour sa ville, alors il en capturait tous les signes d'angoisse. Ce n'est pas la ligne générale qui retenait le journaliste mais le presque rien. Il s'attachait à une file d'attente, un étal de fruitier, un kiosque à musique. Et là, s'offrait aux rides minuscules du détail singulier, notait les mots, se laissait enva