Même si le désir et l'amour, philein, sont inscrits dans le mot même de philosophie, c'est à la psychanalyse qu'il faut pourtant accorder un petit avantage. Non que le psychanalyste soit «le mieux placé» pour parler de l'amour. Les mots qui lui viennent du divan, de liaisons et déliaisons, le poète les découvre en son âme, le prêtre les entend dans le confessionnal ou le juge au tribunal, et chacun, de ce qui tresse «amour, désir, jouissance, filiation, transmission», a quelque savoir dans son esprit, souvenirs et fantasmes, ou l'expérience d'émotions, de plaisirs, de douleurs noués en son corps. Mais la situation même de l'analyse fait que ce qui se se pense ou s'éprouve est comme sommé de se dire, de se muer en discours. Aussi peut-on donner au psychanalyste, pris lui-même par le transfert dans ce qu'il écoute, quelque chose comme un titre d'expert en mots et maux d'amour, de «témoin actif du déploiement d'une parole où l'amour est pris et preneur à la fois».
C'est de sa «longue pratique psychanalytique» et, chose rare, de connaissances cinématographiques que se prévaut Jean-Jacques Moscovitz, psychiatre, pour éprouver ce qu'il nomme Hypothèse Amour. Il ne s'agit pas d'une étude conceptuelle, qui viendrait corroborer ou infirmer telle partie du corpus freudien. Plutôt d'une méditation, une réflexion sur l'élection amoureuse, l'inversion de l'amour en haine, le sexe et la passion, la déshérence de l'abandon, l'inceste, la sexualité féminine, la fonction phallique, etc.