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Libération
Interview

Le danger est derrière la porte.

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publié le 18 janvier 2001 à 21h58

Pourquoi avoir choisi Jung comme héros plutôt que Freud?

Je n'aime pas Freud. Il me semble qu'il a toujours fermé des portes, en disant: «C'est comme ça, voilà la réponse», alors que Jung laissait les possibilités ouvertes. De ce fait, c'était une figure plus disponible pour moi, en tant que romancier, et pour le lecteur aussi, je suppose. Quand j'ai commencé à écrire Pilgrim, ça débutait par la guerre de Troie. J'ai écrit trente ou quarante pages où Pilgrim était Tirésias: c'est pour cela qu'il est éternel et condamné à être homme et femme. Mais il faut savoir que tous les jours, après le déjeuner, je descends de mon bureau avec mes feuillets et Bill me les lit à voix haute ­ il lit admirablement. Je voyais bien qu'il n'aimait pas trop. Un jour, il m'a dit: «Tiff, je vais pas m'ennuyer à taper ça. Et j'ai une question: quand est-ce que tu vas commencer ton roman?» J'ai décidé de reprendre donc à une époque où je me sentais à l'aise, au début du siècle. Les arts et la technologie fleurissent, mais tout ça va sombrer dans le carnage de la guerre. C'est comme si la guerre de Troie ne s'était jamais achevée.

La guerre est un motif récurrent dans votre oeuvre. Et même quand elle n'est pas directement présente, tous vos personnages sont en lutte.

Je suis né dans un monde qui sortait de la Première Guerre mondiale, qui subissait la crise de 1929. Puis il y a eu la guerre civile d'Espagne, la seconde guerre, la bombe, l'Indochine, les guerres d'indépendance en Afrique, etc. Cela oblig