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Libération
Critique

Autopsie des corporations.

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Une étude sur les corporations, rouages essentiels de la société de l'Ancien Régime, rongés par le réglementarisme et le népotisme, abolis en 1791.
publié le 8 février 2001 à 22h43

L'idée de corporation, malgré les tentatives de Vichy pour lui redonner une certaine jeunesse, est aujourd'hui bien oubliée. C'est pourtant une composante essentielle de la société d'Ancien Régime. Elle en est le cadre pour les activités de production mais surtout elle en exprime parfaitement l'idéologie, tant il est vrai que le principe de la communauté et de la hiérarchie est le ressort principal de la monarchie française. Montesquieu et bien d'autres après lui considéraient même les «corps intermédiaires» comme des contrepoids indispensables pour que la royauté ne devienne pas un despotisme. La suppression des corporations crée donc un traumatisme considérable que l'on a peine aujourd'hui à réaliser. C'est ce que montre avec une force et une érudition impressionnantes le dernier livre de l'historien américain Steven Kaplan, sans nul doute l'un des meilleurs spécialistes de la France du XVIIIe siècle. Son travail brille par la profusion des exemples, laissant au lecteur l'impression que pas une miette de cette histoire somme toute assez courte ne lui échappe. Il faut pourtant le lire en détail, car il est riche de multiples réflexions stimulantes sur des questions d'histoire qui n'ont pas perdu leur actualité. Si ce livre est une remarquable description du monde du travail à la fin de l'Ancien Régime, il est aussi une analyse subtile des difficultés que rencontre une société rigide mais pas totalement bloquée, loin s'en faut, quand elle veut arpenter les voies qui conduise