Comme Arthur Cravan et Mina Loy ne sont pas fréquentés par les mêmes lecteurs, leur histoire d'amour laisse en général indifférents leurs fans respectifs. Arthur Cravan, le poète boxeur, dadaïste avant l'heure, disparu au Mexique à 31 ans fin 1918, ressurgit régulièrement, figure tutélaire de tous les jeunes provocateurs géniaux que la France a comptés et comptera. Il était le neveu d'Oscar Wilde (l'épouse de celui-ci, Constance, était la soeur du père d'Arthur Cravan), il a créé une revue, Maintenant, où ses idées sur la peinture contemporaine ont fait sensation (il a traité les avant-gardistes de vieux tableaux, Suzanne Valadon de «vieille salope» etc.) et il avait la manie de se volatiliser.
Mina Loy (1882-1966) est de ces auteurs anglo-saxons qu'on croise à Paris de part et d'autre de la Première Guerre mondiale. Même Ezra Pound n'a pas dit que du mal de son oeuvre poétique, il parle de «l'expression d'un être intelligent, désespéré, rôdant au bord d'un précipice». Alice B. Toklas et Gertrude Stein la trouvent intelligente. De Stein, Mina Loy a fait ce portrait en forme de poème qui figure dans le Baedeker lunaire: «Curie/du laboratoire/du vocabulaire/elle broyait/le tonnage/de la conscience/en phrases coagulées/pour en extraire/le radium du mot» (1)
Comment Arthur Cravan et Mina Loy se sont rencontrés, aimés et, en 1918, mariés, c'est ce que raconte Double coeur, le premier roman d'une Irlandaise née en 1972, Antonia Logue. «La première fois que j'ai entendu parler de Cra